Voilà quatre ans que la crise anglophone sévit au Cameroun. Le gouvernement et les rebelles refusent toujours de dialoguer pour résoudre ce conflit. A Bamenda, les civils ont peur.
La crise anglophone a fait plus de 3.000 morts et forcé plus de 700.000 personnes à fuir leur domicile.
"La situation sécuritaire à Bamenda est tendue, nous ne sommes pas en sécurité", explique ce chauffeur de taxi-moto, rencontré dans le centre de Bamenda, le poumon économique du nord-ouest du Cameroun.
Le chauffeur de taxi-moto dit avoir peur des militaires, qui encaisseraient des pots de vin et le menaceraient de lui saisir sa moto.
Quatre ans que la ville de Bamenda est plongée dans une spirale de violence. Tout avait commencé fin 2016, début 2017 avec des revendications de la minorité anglophone se sentant marginalisée par le pouvoir central. Ensuite, un mouvement de revendication indépendantiste s'est peu à peu transformé en véritable guerre armée.
L’insécurité dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du Cameroun a forcé plus de 4 400 écoles à fermer dans ces zones.
A l'époque, en 2016, le pouvoir réprimait dans le sang des manifestations pacifiques dénonçant la marginalisation de la minorité anglophone. Depuis, des groupes armés de résistance se sont formés et la situation est hors de contrôle.
Paul Achobang, maire de Bamenda, fait partie du camp du président Paul Byia, qu'il soutient coûte que coûte, même si celui-ci se refuse de venir visiter la région depuis le début de la crise.
"Tous les jours il offre des amnisties, libère ceux qui ont été fait prisonniers, il offre des hébergement", soutient Paul Achobang, pour qui les habitants de Bamenda sont eux-mêmes responsables de leur malheur. Selon lui, le gouvernement central voudrait reconstruire les routes ici, mais aucune entreprise ne veut de ce contrat. La ville serait trop dangereuse.
Mais le maire insiste : tôt ou tard, on n'entendra plus de tirs et d'explosions dans la ville. Les choses seraient en train de s'améliorer aves la présence renforcée de l'armée au fil des ans.
Lire aussi►Cameroun : les violences persistent dans la zone anglophone
Et pourtant, à peine quelques heures après cet entretien, des tirs et des explosions vont à nouveau retentir à travers la ville. Parmi les victimes ce jour-là, un enfant de huit ans. Les soldats et les séparatistes se battaient devant sa maison.
"Cela fait quatre ans qu'il a toujours su exactement où se cacher quand il entendait des tirs", raconte la tante du jeune garçon. Cette-fois aussi il s'était caché, avec sa grand-mère. Mais en sortant de la maison, lorsque le silence était revenu, l'enfant a été happé par l'explosion d'une grenade.
Un cycle infernal, dans lequel chacun se rejette la responsabilité. C'est ce que note Roland Arrey, pasteur dans un village près de Bamenda.
"Chacun veut raconter son histoire pour se faire passer pour les vainqueurs de ce bras-de-fer", assure-t-il. Même si le gouvernement et les séparatistes le prétendent, personne ne veut d'un dialogue dialogue. En attendant, se désole le pasteur, les deux camps jouent avec les vies des Camerounais.
Lire aussi►Le colonialisme à l'origine des séparatismes africains