Les Koglweogo sont accusés d'exacerber les conflits ethniques au Burkina Faso. Le pouvoir est appelé à limiter l'influence de ces milices en arme.
Les Koglweogo sont des milices qui se sont autosaisies de la gestion de la sécurité dans leur localité
De nombreux Burkinabè vivent dans la peur des divisions ethniques. Les violences djihadistes et l'augmentation du banditisme tendent à faire disparaître le vivre-ensemble. Aucune stratégie ne s'est révélée efficace à ce jour pour consolider la cohésion sociale. Des milices privées appelées Koglweogo profitent de ce vide. Mais leur action est loin de faire l'unanimité.
À Nioko 1, une banlieue de Ouagadougou où s'est rendue une équipe de reportage de la DW, Jean Kaboré, le président des Koglweogo de la localité est fier de montrer des objets volés : derrière une lourde porte métallique verrouillée à l'aide d'une chaîne, sont en effet rangées plus de vingt motos couvertes de poussière et quelques vélos. C'est le résultat des patrouilles que son groupe a effectuées. La milice est active depuis six ans.
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"Nous collaborons avec la police et la gendarmerie. Depuis la création du groupe, nous avons attrapé beaucoup de bandits et saisi de l'argent ainsi que des motos volés. Les propriétaires sont chaque fois satisfaits de retrouver leur bien. Quand nous mettons la main sur un voleur, nous le remettons à la police pour que justice soit faite",explique le leader des Koglweogo de Nioko 1.
Selon Jean Kaboré, la présence de ce groupe dont le nom, "Koglweogo" signifie "veilleurs de la forêt" en langue Moré, a permis de réduire l'insécurité.
L'Etat a reconnu leur existence. Mais des observateurs pensent que les autorités ont perdu du coup le monopole du contrôle des armes sur le territoire.
Cette situation, ajoutée à la présence de groupes armés étrangers, provoque un climat de peur. Les membres de la communauté peule par exemple, appelés Fulani en Afrique anglophone, se disent victimes de stigmatisations de la part des miliciens qui les associent au prédicateur malien peul Amadou Kouffa.
Même l'armée burkinabè est accusée par l'ONG Human Rights Watch de soumettre les peuls à des exactions.
Le climat de méfiance affecte la coexistence pacifique, estime Issa Diallo, le président de la Commission nationale de la langue peule qui parle de "territoires du nord où si tu vas au marché tu ne reviens pas. La méfiance est là et les autorités politiques du pays n'ont rien fait pour que cette méfiance disparaisse".
Les Koglweogo de Nioko 1 sont accusés de s'en prendre à toute personne n'appartenant pas à la communauté Mossi. Accusation que rejette la milice, prétendant être composée de gens de diverses ethnies qui protègent autant les églises que les mosquées.
Face à cette crise de confiance, le sociologue Ousmane Lankoandé, secrétaire exécutif du mouvement "Balai citoyen" recommande le dialogue. L'expert estime que la paix est encore possible car, "l'histoire du peuplement du Burkina Faso a toujours été faite des guerres fratricides et tribales. On a vécu des moments plus terribles, et les gens sont arrivés à vivre ensembles et à se réconcilier", justifie-t-il.
Mais pour Issa Diallo le président de la Commission nationale de la langue peule, d'importantes ressources ont été investies dans des projets de réconciliation sans que cela n'aboutisse. Et selon lui, il faut régler le problème à travers des lois.